Vie chretienne Comos Plan Engin de recherches Plan du site

Samizdat

J'ai entendu l'astronome aveugle.




Contact mettant en vedette Jodi Foster, Matthew McConaughey
Réalisé par Robert Zemekis
Basé sur un roman de Carl Sagan.

Critique par Mike Hertenstein[1]


ContactLe film Contact débute avec une prise de vue de la Terre vue de l'espace, une cacophonie de signaux audio - musique, nouvelles, radio, télévision – puis un long zoom arrière, la Terre rapetissant et disparaissant, les signaux s'amenuisant en ce frisson “ le silence de l'espace infini ” qui terrifiait tant Pascal. Le thème, en clair, est la séparation de et la quête de l'Autre. La scène suivante nous montre une petite fille, ayant perdu sa mère à la naissance, élevé par un père aimant qui, plus tard, meurt également; après ses funérailles, elle crie dans son radio émetteur “ Papa, es-tu là? ” La suggestion nous indique que sa future carrière n'est autre que la recherché du Papa dans le ciel. Ellie Arroway (Jodie Foster) devient une radio-astronome, impliqué dans le projet de la Recherche pour la Vie Intelligente Extra-Terrestre (SETI[2]). Le défunt Carl Sagan, qui a écrit son roman en 1985, sur laquelle le film est basé, fut passionnément impliqué dans le programme SETI durant toute sa carrière.

L'histoire, en résumé.
Le projet SETI d'Ellie reçoit un signal provenant de l'espace, en plus de plans pour construire un vaisseau spatial. En un étalage d'effets spéciaux aboutissant au climax, elle voyage ce vaisseau spatial pour aller rencontrer un extra-terrestre sous la forme de son père. Il révèle que la galaxie regorge de vie, et qu'heureusement, ni elle ni la Terre n'est seule.

Durant les derniers jours de Sagan, il a dû se sentir sur le point d'obtenir le désir de son cœur: les derniers mois ayant vue la découverte de planètes hors du système solaire, de l'eau découverte sur la lune, de nouvelles théories sur les conditions sous lesquelles la vie pourrait se développer, et un météorite offrant un nouvel espoir de découvrir la vie sur Mars. De tels développements ont sans aucun doute donné de l'espoir et de la force à Sagan durant sa bataille avec la maladie sanguine qui a fini par prendre sa vie l'année dernière.

J'ai de bons souvenirs de Carl Sagan, habillé de son col roulé noir et ses cheveux longs, durant les années soixante. À la télévision avec “ l'Éditorialiste Scientifique, Jules Bergman ”, tenant des modèles en plastique au cours du Projet Apollo, enseignant à ses auditeurs la différence entre le Module de Commande et le Module de Service. Je connaissais déjà la différence, bien sûr, mais le fait qu'un homme adulte avec un tel look hippie puisse le savoir aussi prouvait que l'amour de la science ne vous transformait pas nécessairement en un nerd de la NASA avec une coupe de cheveu en brosse.

Alors que les années passèrent, Je perdis peu à peu mes sentiments chaleureux envers Sagan alors qu'il dégénérait en une sorte de Hal Lindsey du réseau PBS, affirmant sobrement que le cosmos est “ tout ce qu'il y a, avait, et aura toujours ” et d'autres convictions religieuses de la sorte rendant ainsi sa science suspecte. (Ça en plus du fait qu'il portait toujours ce même costume de “ scientifique hippie ” des années soixante tout au long des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix.)

Sagan s'identifiait lui-même comme “ exo-biologiste ”, un expert sur la vie extra-terrestre. Il modélisa les conditions sous lesquelles la vie aurait pu se développer sur d'autres planètes alors qu'il attendait l'obtention de spécimens. Il n'a pas seulement attendu: Sagan encourageait activement le projet SETI sur tous les fronts. Il siégeait sur des tables et comités et organisait des débats sur le sujet. Il aida à concevoir les inscriptions de salutation qui sont mises sur les satellites envoyés hors de notre système solaire. Il fonda la Société Planétaire, dédiée à la recherche d'Extra-Terrestres. Et peu importe ce que Sagan ait pu penser de la représentation négative des scientifiques du film, sa société fut la joyeuse récipiendaire d'un don de $100,000 provenant de Steven Spielberg, tiré d'une part des profits du plus adulé des films d'extra-terrestres de l'espace, E.T. L'Extra-Terrestre.

L'enfant solitaire de E.T. était Elliot; dans Contact, Ellie découvre – dans le roman, mais pas dans le film, – que le père qu'elle a aimé et chéri tout au long de sa vie, n'était en fait pas réellement son père. En d'autres mots, le “ récit de création ” personnel d'Ellie se dévoile n'être qu'un mythe; cette vérité douloureuse lui a été cachée jusqu'à ce qu'elle soit assez “ mature ” pour la recevoir. Carl Sagan a passé une vie entière à tenter de persuader les gens d'abandonner leurs croyances pseudo-scientifiques en un Père qui est dans les cieux et qui créa la Terre. Pourquoi, demandait-il, dans une ère scientifique, est-ce que les gens continuent à se tourner vers la religion et d'autres superstitions? Pourtant, au moment même où il était occupé à souligner les dangers de l'ignorance scientifique, Sagan ne se gênait jamais pour tourner cette ignorance à son avantage lorsqu'il apportait ses opinions sur l'histoire, la religion, l'éthique, la philosophie, et la politique publique derrière le brouillard de sa propre foi fondamentaliste dans la “ Science. ”

Ellie Arroway

Contact, tant le livre que le film, gaspille beaucoup trop de temps et d'espace (pour emprunter une phrase trop souvent formulée dans le film) sur la confrontation entre les fous religieux et les bureaucrates entêtés d'un côté, et les scientifiques, en quête de vérité, de l'autre. (Pour un gars si pointilleux sur “ l'objectivité ”, Sagan savait assurément comment exploiter des stéréotypes et préjugés.) Le comité chargé de choisir un pilote demande, “ Croyez-vous en Dieu ” ? Ellie répond, “ Je ne vois pas la pertinence de cette question. ” Moi non plus, et je crois en Dieu. Pourquoi ne pas simplement envoyer quelqu'un d'honnête pour observer et ensuite revenir faire un rapport? C'est de la science, n'est-ce pas? Mais Sagan, dans le livre et le film, sent la nécessité de continuer à pousser la religion dans l'histoire, une confession, apparemment, de la nature religieuse évidente de la quête du projet SETI.

Pourtant le film, dirigé par Robert Zemeckis (Forest Gump, Retour vers le Futur), diffère du livre sur un certain nombre de points. Entre autres, il suggère bien davantage que c'est son sentiment de solitude qui pousse Ellie dans sa quête résolue de contact. Le livre inclus un “ Révérant Palmer Joss, ” un fondamentaliste un peu dingue qui déteste la science pour ses attaques sur la foi religieuse. Le Joss du film (Matthew McConaughey), par contre, offre une critique intéressante sur la science matérialiste: “ Nous sommes si avancés sur le plan technologique et pourtant nous nous sentons plus seul et séparés que jamais. Alors nous recherchons quelque chose pour remplir le vide de notre vie. ” Dans le livre de Sagan, Joss et Ellie ont une étrange mais grandissante amitié: une image de la religion abandonnant graduellement sa foi en Dieu pour une foi en la science. Dans le film, Joss et Ellie deviennent amants, à l'image de la science et la religion entrelacées. Dans une réinterprétation subversive du matériel, Zemeckis semble associer la quête du projet SETI de Carl Sagan avec des personnages qu'il aurait lui-même ridiculisés comme étant des dévots de superstitions. Dans son initiative la plus audacieuce, Zemeckis inclue un personnage dans le film qui ne se trouve pas du tout dans le livre, un collègue de travail d'Ellie qui plane au-dessus de l'action : un astronome aveugle qui ressemble beaucoup à Sagan.

Palmer Joss

Étrangement, la morale de l'histoire, tant du film que du livre Contact, est une sorte d'affirmation à l'effet que “ Tu dois avoir la Foi. ” La demande d'Ellie d'une preuve de l'existence de Dieu fait écho au manque de preuve de son expérience dans les étoiles. Pourtant la prise de position de Sagan dans le roman ne constitue pas un apologétique inattendu du théisme, mais vise SETI: Continue de regarder au ciel, dit-il, même sans aucune preuve d'une présence là haut.

Le message du film est légèrement différent, et comme le signal provenant de l'espace, un peu difficle à décoder: Zemeckis semble affirmer qu'il faut “ avoir foi en la foi. ” Ellie mise toute sa vie sur la bonne volonté des extra-terrestres, insistant que tous doivent leur faire confiance. (“ Ils sont avancés. Ils ne peuvent qu'être bons. ”) À son retour, tous doivent accepter la parole d'Ellie que ce qu'elle a vécu est réel – exactement comme un enlèvement par les extra-terrestres. Dans ma séquence favorite, le milliardaire fou qui finance l'expédition – un rappel morbide au leader du culte Heaven's Gate (La Porte des Cieux) Marshall Applewhite – remplit l'écran en disant, “ Veux-tu faire un tour? ” Et je me dis, “ Veux-tu dire sur un OVNI poursuivant la comète Hale-Bopp? ” Bien sûr. Il faut juste avoir la foi, n'est-ce pas?

De même, il est difficile de savoir quoi penser du conseil qu'Ellie donne à un groupe de jeunes enfants d'école à la fin du film : “ Continuez à chercher pour vos propres réponses. ” Qu'est-ce supposé vouloir dire? Soyez objectifs et empiriques? Soyez bien sûr de pouvoir prouver personnellement quelque chose avant d'y croire? Ou soyez subjectifs, en ayant foi en n'importe quelle vérité qui semble fonctionner pour vous? L'astronome aveugle était un bel ajout; Contact aurait été bien plus fidèle à la réalité si parmi les personnages nous avions trouvé aussi un réalisateur de film aveugle.

Et pourtant, on sait que les aveugles peuvent parfois manifester une sensibilité particulière dans certaines situations. Sans aucun doute que Sagan et Zemeckis sont clairement au même diapason de nos désirs profonds de trouver Quelqu'un dans l'Au-delà. Lorsque je quittais le cinéma, J'ai entendu un gars dire à sa copine qu'il avait vu Contact trois fois durant le dernier mois et qu'il ne se pouvait plus d'attendre que le film soit présenté dans des cinémas bon-marché pour le revoir encore quelques fois. “ Pourquoi? ” demanda-t-elle. “ Qu'y a-t-il dans ce film que tu aimes tant? ” Il a écarquillé les yeux et a confessé, “ Ce film réalise tout ce que j'ai rêvé depuis que je suis un petit garçon. 

On peut se souvenir du jeune Elliot dans E.T.: exclu, incompris, ignoré, faisant un vœu à une étoile afin que Quelqu'un dans l'Au-Delà l'écoutera. Ou Dorothée[3], emprisonnée dans son monde en noir et blanc, désirant ardemment “ un endroit où il n'y a jamais de problème. ” Ou même une Judy Garland adulte, enbourbée dans des ennuis toujours plus sérieux, chantant la chanson[4] ayant fait sa renommée jusqu'à la fin, désirant ardemment s'envoler au loin. Le titre original du projet SETI, lancé par le collègue pionnier de Sagan, Frank Drake, fut le “ Projet Ozma ” – nommé par Drake en rappel de la princesse d'Oz.

Carl Sagan a déjà suggéré, dans une série de Cosmos TV, que le désir ardent et profond que nous ressentons lorsque nous sommes au bord de la mer est dû au fait que la mer est où l'homme a commencé et où une partie de lui désire ardemment retourner. Évidemment, Sagan insista aussi sur la notion que les humains viennent d'un soupe primordiale et n'a pourtant jamais parlé du bon sens de désirer ardemment retourner à la soupe. C. S. Lewis tira des même données une toute autre analyse: “ Toute votre vie, une extase inaccessible a plané juste au delà de votre conscience. Le jour vient lorsque vous vous réveillerez pour trouver, au delà de tout espoir, que vous l'avez atteint, ou bien, qu'elle était à votre portée et vous l'avez perdue à jamais. 


Une note finale poignante.

Parmi les révélations de la version livre de Contact, qui n'est pas abordé dans le film, était ceci: les extra-terrestres disent à Ellie que l'univers n'est pas le produit du hasard, après tout – mais fut conçu, avec un message du Fabricant incorporé dans des mathématiques à haut niveau, encodé dans la lointaine décimale de Pi. Voici une trouvaille inattendue et très humaine dans une vision apparemment si matérialiste : un désir profond pour une preuve définitive, mathématique de la valeur de l'être humain et sa raison d'être – et pour une prevue d'une Intelligence et d'une Volonté derrière tout cela. Voici un aperçu de ce que devait être le mystère le plus frustrant pour Carl Sagan: pourquoi est-ce que Dieu, s'il existe, se cache à l'ombre; pourquoi, lorsqu'il pourrait bannir tout doute, Dieu insiste-il toujours sur la foi?

S'il y a un message du Concepteur tissé à même la tissus du cosmos il semble que ce pourrait être celui là: Il refuse de Se laissé réduire à une équation, universellement acceptée et ignorée. Le cosmos est construit de manière à ce que Dieu ne soit pas seulement perçu comme un “ à propos ”, mais soit reconnu – non comme un fait, tel le point d'ébullition de l'eau, non comme un “ ceci ou cela ”, mais comme un “ Toi ” avec qui nous pouvons avoir un contact.

Je ressens une profonde tristesse que Carl Sagan soit mort avant de rencontrer ce Quelqu'un de l'Au-Delà. Peut-être que ça ressemble à une manière détournée de souhaiter qu'il ait “ trouvé Dieu ”, mais ce n'est pas ce que j'ai voulu dire exactement. Pas aussi simplement. Ce que je souhaite c'est que Carl Sagan ait pu avoir la chance de rencontrer une quelconque intelligence extra-terrestre, venant de l'espace, et donc ait pu se prouver à lui-même – de manière empirique et définitive – que c'était vraiment le genre de contact qu'il recherchait depuis toujours. Et je me demande ce qu'il se serait demandé ensuite.


Notes

[1] - Paru d'abord dans la revue Cornerstone 26, no. 116. 2000 Traduction: Francis Leblanc et Paul Gosselin

[2] - NdT; Ou, en anglais, Search for Estra-Terrestrial Intelligence.

[3] - NdT: Personnage du film, le Magicien d'Oz.

[4] - NdT: Ayant pour titre: Somewhere, Over the Rainbow.