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Samizdat

Comprendre l'épreuve :
L'Huguenot et l'Évangélique






Paul Gosselin (2015)

Je viens de terminer la mise en page d'un très beau texte par un huguenot, un dénommé Jean Bernard. Ce sermon porte le titre: La consolation des chrétiens en deuil, mais à vrai dire on aurait pu également appeler de texte “La consolation des chrétiens accablés”, car le sujet est assez général (et solide) qu'on pourrait l'appliquer à tout chrétien qui vit des épreuves. Il faut bien s'entendre, ce n'est PAS un sermon d'un pasteur qui a lu “un livre intéressant sur la souffrance” au collège biblique et qui a pensé en parler un dimanche matin. Non ce n'est pas ça, car ce que nous propose Bernard est une méditation sortie du FEU, car aux mains des catholiques de France ces huguenots ont connu tortures, viols, massacres, pillages de leurs biens, condamnation aux galères, emprisonnement et l'exile tout ce que les chrétiens de la Syrie peuvent connaître actuellement...

Enfin, ce sermon est disponible ici en version PDF et peut être imprimé ou encore lu sur un gadget, genre Kindle, Ipad ou Kobo.

Un vrai trésor en ce qui me concerne, bien qu'il faut s'habituer un peu au vieux français et les "s longs" (ƒ), mais ça vaut le coût... Faut préciser que les “s longs” ressemblent à la lettre f, mais étiré. Après quelques lectures de ce genre, j'en déduis qu'on utilisait le s ordinaire uniquement à la fin d'un mot seulement et ailleurs on utilisait le s long. Les Anglais de la même époque faisaient de même, mais je ne sais pas si d'autres Européens l'utilisaient...

Seul bémol à ça, Bernard apporte des conseils à des parents ayant perdu un enfant et son commentaire présuppose le baptême de nouveau-nées leur apporte le salut... En tant qu'anabaptiste, je dis BOF... Même si le paedobaptisme est en effet une pratique ancienne, les arguments en sa faveur (trop souvent trempant dans la manipulation émotive) ne tiennent pas la route lorsqu'on les examine de près dans les Écritures. Pour les parents dans un tel cas, la consolation véritable se trouve simplement dans deux choses:

1) Dieu est JUSTE et MISÉRICORDIEUX
2) Dieu essuiera TOUTE larme...

Il faut préciser qu'on sait peu de choses sur ce Jean Bernard, pas de page Wiki, ni de biographie sur le web.


L'épreuve, vue par les huguenots

Pour voir les épreuves comme ces huguenots, il faut franchir un obstacle important.

Les évangéliques d'aujourd'hui se sont adaptés (lire: ils ont fait des compromis) avec les idéologies dominantes. Entre autres, au 20e siècle les évangéliques se sont retrouvés entourés, d'un côté, par les communistes qui promettaient, ici-bas, le paradis des prolétaires et, de l'autre, par les capitalistes promettant un paradis de consommation, les évangéliques du 20e siècle n'ont pas eu le courage de critiquer et de remettre en question ces paradis de pacotille. Et non... Donc, pour bien paraître aux yeux des hommes de leur génération, ils ont choisi plutôt de les IMITER, c'est-à-dire en prêchant que le chrétien aussi peut obtenir aussi son paradis ICI-BAS. C'est un concept que bien des pentecôtistes en particulier ont propagé, soit sous la forme la plus grossière de l'évangile de prospérité (doctrine de merde il faut bien le dire) ou encore sous des formes plus “subtiles”, comme celui propagé par le mouvement "Word-Faith" qui affirme que "par la foi" l'on peut obtenir TOUT ce que l'on veut, soit les bénédictions sociales, médicales, relationnelles, etc... ce qui revient (implicitement) à affirmer que l'on peut obtenir son paradis ici-bas...

Et cette doctrine a pénétré les milieux pentecôtistes à tel point que bon nombre de pasteurs propagent ce genre d'enseignement sans même savoir quelle est sa source. Je soupçonne fortement que le Word-Faith a ses racines véritables dans la pensée de l'athée Nietzsche et son concept de “Volonté de puissance”. Pour vous amuser, prenez la pensée poslitive païenne et remplacez le mot “volonté” par “foi” et le tour est joué... Il est vrai que parfois dans la vie chrétienne nous suivons ce Roi de victoire, qui comme David, vit quelques difficultés, mais en général adulé par la foule, passe de victoire en victoire, mais il arrive également que le chemin du chrétien passe ailleurs et qu'il doive marcher derrière le Roi des douleurs, celui dont on dit:

Il s'est élevé devant lui comme une faible plante, comme un rejeton qui sort d'une terre desséchée; Il n'avait ni beauté, ni éclat pour attirer nos regards, et son aspect n'avait rien pour nous plaire. Méprisé et abandonné des hommes, Homme de douleur et habitué à la souffrance, semblable à celui dont on détourne le visage, nous l'avons dédaigné, nous n'avons fait de lui aucun cas. (Ésaïe 53: 2-3)

Il faut prendre conscience que l'affirmation que l'on peut marcher constamment “dans la victoire” et finalement créer son paradis ICI-BAS est tout à fait en contradiction avec la doctrine de la Chute qui est enseignée en Genèse 3 qui nous affirme clairement que nous vivons désormais dans un monde DÉCHU et que notre véritable demeure n'est PAS ici-bas. C'est ce qu'affirme aussi le Nouveau Testament:

Tout cela implique que dans un monde DÉCHU, la maladie et les épreuves diverses de la vie sont normales. Mais ces épreuves ne sont pas désirées par Dieu, car c'est le Jardin d'Eden qui représente la volonté parfaite du Père. Mais une fois franchi le pas de la désobéissance les conséquences de la Chute ont atteint l'humanité. Mais, pour les adeptes du Word-Faith, la foi se réduit à un outil, un outil qui permet d'obtenir des choses désirées ET (implicitement) “ une baguette magique ” pour sortir du piège d'un monde déchu. Mais les Écritures nous indiquent clairement que notre demeure véritable n'est PAS ici-bas. Il est ironique que la liste d'honneur des héros de la foi présenté au chapitre 11 de l'épître aux Hébreux énumère d'abord ceux qui ont obtenu toutes sortes de miracles par la foi, mais ajoute :

Il est clair que la foi ici est autre chose qu'uniquement un gadget pour obtenir le “ succès ”, le conjoint “ idéal ”, la guérison, la carrière désirée, etc... La foi dont il est question ici va bien plus loin, car elle est relationnelle. Il s'agit donc d'une relation de confiance en quelqu'Un. Et cette foi là, regarde plus haut que cette terre uniquement. L'apôtre Paul tape à nouveau sur ce clou dans sa première épître aux Corinthiens et dit : Si c'est dans cette vie seulement que nous espérons en Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes. (1Cor 15:19)

Ouais, il faut avouer qu'il y a un mot que DÉTESTENT les dévots du Word-Faith, c'est le mot “résignation”. Mais la prise de conscience et l'acceptation du fait de vivre dans un monde déchu n'implique pas le fatalisme. Par exemple, les épîtres du Nouveau Testament enseignent aux esclaves “As-tu été appelé étant esclave, ne t'en inquiète pas; mais si tu peux devenir libre, profites-en plutôt.” (1Co 7: 21) Et si bien sûr cela s'applique aux esclaves, cela doit également s'appliquer à ceux qui souffrent de maladie, difficultés financières ou de solitude. Le chrétien n'est pas un fataliste. D'autre part, je crois toujours aux miracles. Dieu n'a pas changé et peut intervenir de manière surnaturelle dans nos vies.

En passant, si la doctrine de la Chute (et ces implications) a été oubliée ou ignorée c'est qu'aujourd'hui un grand nombre d'évangéliques refusent une lecture directe et littérale des premiers chapitres de la Genèse (et le voient comme un texte “ moral ” ou “ spirituel ”, c'est-à-dire semi-mythique). Devant la souffrance dans la condition humaine, les dévots du Word-Faith n'ont donc pas de réponse, sinon des commentaires commes celles des amis de Job ; Tu manques de foi mon frère... Il reste que la doctrine de la Chute est la doctrine la plus empirique de toute la Bible, car elle est confirmée TOUS les jours à la une des nos quotidiens...

Mais lorsque les promesses des idéologies de ce monde passent entre nos doigts comme du sable, alors comme les huguenots, les chrétiens d'aujourd'hui doivent tourner leurs yeux vers le ciel et le monde à venir où est notre demeure véritable et marcher aujourd'hui d'une manière digne de l'appel qu'on a reçu.