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Samizdat

Addicted to Mediocrity:
20th Century Christians and the Arts

(Adonné à la médiocrité: les chrétiens du vingtième siècle et les arts), par Franky Schaeffer. Illustrations par Kurt Mitchell.
Crossway Books, 9825 W. Roosevelt Road, Westchester, IL 60153, 1981, Fifth Printing 1982.





Compte rendu par Ellen Myers

Franky Schaeffer, le fils de Francis et Edith Schaeffer qui ont fondé la communauté 'L'Abri' en Suisse, est connu par beaucoup de chrétiens comme le créateur, producteur et directeur des séries de films How Should We Then Live? (Comment devons-nous vivre?) et Whatever Happened to the Human Race? (Qu'est-ce qui est arrivé à la race humaine?) Schaeffer est aussi peintre et, excluant le livre présent, le coauteur d'un autre livre, Plan for Action (Plan pour action), publié par Revell. Ainsi il est bien qualifié de parler des chrétiens de notre temps et des arts comme artiste reconnu et chrétien croyant la Bible.

Schaeffer définit 'les arts' comme 'toute la gamme de l'expression humaine - de la manière dont nous décorons nos foyers jusqu'au David de Michelange, de la lettre écrite la plus simple jusqu'aux œuvres de William Shakespeare'. Schaeffer fonde sa définition des arts sur la perspective de création biblique:

Schaeffer se préoccupe du fait 'qu'une grande partie de l'église a oublié jusqu'à quelle point cette question est centrale'. Cette préoccupation est le fardeau principal de ce livre et motive le titre provocateur, et le graphisme de la couverture et des dessins extrêmement satiriques qui apparaissent dans le texte. La couverture du livre montre un ouvrier à l'air mi-attardé avec un écusson 'chrétien' sur la poche de son pantalon qui recouvre de peinture blanche avec son rouleau la fameuse fresque de Michelange montrant Dieu créant Adam. Un des dessins moins acerbes montre les arts principaux présentes par un pinceau, une trompette, un soulier de ballet, et une plume au gibet avec des cordes de potence autour de leurs 'cous', et une figure vêtu en noir ressemblant un prêtre qui agit comme bourreau.

Schaeffer affirme que de manière générale les chrétiens du vingtième siècle sont 'adonnés à la médiocrité' dans les arts et que ceci est vrai, en grande partie, au fait que

Schaeffer attaque en particulier la vision du monde utilitariste qui domine la société mondaine et qui a infiltré l'église à la suite de l'influence de l'évolutionnisme darwinien. À son avis il s'agit de la deuxième cause principale pour le niveau de créativité médiocre que nous observons maintenant dans les milieux évangéliques. Étant donné l'influence de cette vision du monde utilitariste, l'enseignement de la perspective de création biblique sur la valeur inhérente d'une personne ou d'une chose, basé sur la création par Dieu, a été largement abandonné: ... l'arbre qui avait de la valeur auparavant, surtout par sa beauté... maintenant avait de la valeur uniquement à cause de la quantité de papier qu'il pouvait produire.'(29) Cette affirmation fait écho aux paroles célèbres de C. S. Lewis dans L'abolition de l'homme sur 'le singe en pantalons qui n'a jamais pu concevoir l'Océan Atlantique autrement qu'en termes de tant de millions de tonnes d'eau froide et salée.' Schaeffer continue:

Schaeffer attaque de manière acerbe l'adoption de la vision du monde utilitariste par l'église pour son propre avancement, et avec une perspective fausse de la 'spiritualité', qui découpe la vie chrétienne dans une hiérarchie d'activités plus ou moins 'mondaines' et d'un monde 'chrétien'. Schaeffer condamne presque toute la télévision chrétienne (et la télévision en général). Il question le soucie négligeable pour la qualité des films chrétiens et dans l'industrie des publications chrétiennes. Il méprise en particulier l'abondance de bibelots, T-Shirts, collants pour automobiles, et autres formes de 'pub pour la foi' de ce type. Il dit:

Les huit chapitres de développement sont suivis d'une section de questions et réponses aussi longue. Tout le livre est parsemé d'exhortations aux chrétiens possédant des talents artistiques de persévérer, et aux chrétiens qui n'ont pas de tels talents d'encourager leurs frères chrétiens créatifs. Dans sa réponse à la question, 'Je suis engagé dans les arts... que dois-je faire en particulier?' Schaeffer dit en partie:

J'ai réduit au minimum les citations des passages les plus durs de Schaeffer car je crois que son livre contient un message qui mérite l'attention de chrétiens qui s'appuient sur la Bible et qui ont de la bonne volonté envers Dieu et leurs frères chrétiens qui ont faim et soif d'art qui se distingue de la production artistique 'évangélique' habituelle. Je suis d'accord avec Schaeffer sur bien des choses qu'il dit touchant l'isolation, le manque d'acceptation, et même l'exil imposé à aux chrétiens talentueux. Je parle comme auditeur et compositeur de musique ayant faim et soif de musique comme celle, par exemple, de Dietrich Buxtehude or de Heinrich Schuetz (compositeurs allemands du 16e siècle) et moins comme un style 'Nashville country Jesus'.

Or j'ai découvert que je ne suis pas si seule en mes goûts musicaux que je le pensais il y a quelques années. J'ai trouvé de chers amis chrétiens, et surtout un ami qui est 'plus attaché qu'un frère' (Proverbes 18: 24), dans la communauté évangélique fondamentaliste qui s'appuie sur la Bible. Ils acceptent 'ma' musique et moi, telles que nous sommes par la création et la grâce de Dieu. Il se peut que Schaeffer n'ait pas été béni de cette manière. Son expression douloureuse de la solitude d'un artiste chrétien extraordinaire, ni son désir profond de fraternité chrétienne ne doivent être négligés dans un contexte de charité chrétienne. (Mon professeur de musique chrétien, excellent et très talentueux, m'a parlé de la sorte aussi.) Hélas, il est vrai aussi qu'un talent musical extraordinaire peut trouver aujourd'hui plus d'acceptation et de support hors des églises ou des universités chrétiennes. Je suppose que cela est vrai dans les autres formes d'art aussi. Enfin, je suppose qu'il est vrai que l'on culpabilise parfois des chrétiens talentueux dans les arts mais dont les talents ne peuvent pas facilement être exprimés dans les programmes et les activités de leurs églises. Ces chrétiens choisissent parfois d'exprimer leurs talents ailleurs, dans des exhibitions d'art, des galeries de peintures ou au moyen d'esquisses dont la thématique n'est pas explicitement 'chrétienne,' dans le cadre d'un concert d'une oeuvre de musique sans paroles chrétiennes ou au moyen de formes ou de styles qui ne sont traditionnels. Il n'y pas lieu de les culpabiliser pour cela. Ceci, je concours avec Schaeffer, est une charge que ces chrétiens ne devraient pas porter. Ma propre expérience m'encourage à espérer que cette fausse charge de culpabilité ne sera pas imposé aux chrétiens talentueux qui expriment avec humilité leurs talents reçus de Dieu (Luc 19: 12). Et même si cela devait arriver - n'importe! Que le Seigneur Lui-même soit notre Juge.

Si, comme Schaeffer, nous incluons la décoration de nos foyers et la correspondance privée dans les arts ou dans la créativité humaine en général, une grande partie de l'accusation de Schaeffer contre l'église évangélique, 'piétiste et silencieuse', est sans fondement. Les arts 'humbles' pour les nommer ainsi - la décoration du foyer, les métiers manuels, la couture, etc. - ne sont ni condamnés, ni rejetés dans aucune église chrétienne. En lisant soigneusement le livre de Schaeffer on se rend compte assez tôt que sa définition élargie de la créativité humaine est abandonnée en effet dans les points les plus importants de sa discussion. Il se préoccupe d'avantage avec l'attitude de l'église à l'égard des beaux arts.

Schaeffer ne s'occupe jamais des dangers possibles dans la poursuite des arts, et ceci est le plus grand défaut du livre. Dorothy L. Sayers note dans son article remarquable 'Towards a Christian Aesthetic' (Vers une esthétique chrétienne) que 'des formes d'art (le 'divertissement' et 'la propagande') ont leur mesure et leur place dans la vie humaine mais qui ont une relation à l'art véritable qui peut se comparer à celle des idoles vis-à-vis Dieu. C. S. Lewis a raison de dire que la créativité de l'artiste peut l'éloigner de Dieu et devenir son idole (The Great Divorce). C. S. Lewis se réfère aussi à des mesures objectives de valeur artistique (la conviction qu'un objet peut mériter la louange à cause de sa qualité ou de sa beauté inhérente) dans son fameux livre The Abolition of Man (L'abolition de l'homme). Schaeffer ne donne aucun critère qui peut définir l'art bon, ou au moins acceptable, dans la perspective de la création biblique, ceci, vraisemblablement afin d'éviter un légalisme moralisant. Il invite les chrétiens d'examiner librement ce que les chrétiens ou les non-chrétiens offrent dans les (beaux) arts. C'est bon (et biblique aussi: nous nous rappelons rapidement 1 Corinthiens 2:12 et 15, et aussi 1 Thessaloniciens 5:21: 'Examinez toutes les choses; retenez ce qui est bon.') Mais en toute justice Schaeffer aurait du considérer le juste soin des pasteurs, parents et maîtres dans l'église pour les âmes des chrétiens dont ils sont chargés. En vue de l'anarchie, la blasphème et l'immoralité évidentes dans tant d'art contemporain (et si bien documentées par Francis Schaeffer dans son livre et le film How Should We Then Live? ), est-ce que les autorités dans l'église ont complètement tort en refusant bien des formes d'art contemporain? Ne peut-on défendre la position qu'un artiste chrétien doit être complètement engagé à manifester le caractère saint et juste du Créateur et Seigneur de l'univers afin qu'il y ait une différence visible entre son œuvre et l'œuvre d'un non-chrétien? Une fois de plus, Francis Schaeffer dans How Should We Then Live nous démontre comment cela peut se faire lorsqu'il parle de la musique 'moderne' de Schoenberg où il y a de la variation perpétuelle sans résolution, que l'on peut comparer à la musique de Bach 'qui, avec ses présupposés bibliques, avait beaucoup de diversité mais toujours avec résolution'. Je crois avec Luther que 'Je ne pense pas que tous les arts devraient être écrases et périr par l'Évangile comme le demandent quelques personnes fanatiques. Je voudrais plutôt que tous les arts, surtout la musique, servent Celui qui les donna et les créa' (cité dans How Should We Then Live?) Je crois aussi que nous devons soutenir toute cette citation. Il faut la liberté pour tous les arts, mais tout en confirmant que la liberté véritable n'est possible qu'en soumission consciente à Dieu. Nous devons enseigner et encourager nos frères et soeurs chrétiens 'd'examiner toutes choses', 'de retenir ce qui est bon' et de 'ne pas toucher ce qui est impur'.

En conclusion, Schaeffer oppose avec raison une dichotomie fausse, l'art 'chrétien' contre l'art du 'monde', où les arts (ou plus précisément, les beaux-arts) sont étiquetés 'mondaines'. Son appel aux chrétiens doués sur le plan artistique à la liberté et au travail joyeux dans notre Seigneur, et aux autres chrétiens de les recevoir et les supporter, est clair et approprié, mais parfois exprimé avec des termes excessivement durs qui offensent plutôt que convaincre (on se souvient de 2 Timothée 2:24-26 nous aurions souhaités que Franky Schaeffer s'en souvienne aussi). Plusieurs points excellents sont faits avec force par Schaeffer, surtout sa grande insistance sur le sens radical de la création de l'homme par Dieu à son image pour la créativité de l'homme et pour son implication total dans toutes les activités humaines. Néanmoins, je crois avec regret que ce livre est insuffisant comme analyse du christianisme du vingtième siècle et les arts, et comme critique de l'église. La solution, comme le dit si clairement Schaeffer lui-même, n'est ni l'analyse ni la critique mais plutôt le travail accompli par des chrétiens qui persévèrent, obéissent et vivent toute leur vie, jour par jour, en servant notre Seigneur.