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Samizdat

Incinération (ou crémation)[1]





Michel Renneteau

Voilà les propos que me tenait, voici quelques années, dans la banlieue nantaise, quelques semaines avant sa mort, Mme Audéon, ancienne institutrice, fille de pasteur protestant, atteinte d'une grave maladie respiratoire, demeurant sourde à toute allusion que je faisais à propos de l'Evangile, du message biblique se rapportant à notre destinée éternelle. Malgré mes efforts, je n'eus pas la possibilité de l'approcher dans ses derniers instants.

Savez-vous que c'est la logique suivie par beaucoup de gens qui exigent que leur corps soit incinéré après leur mort? Leur cadavre réduit en cendres et celles-ci dispersées au vent, aucune chance, à leur avis, de se retrouver... entier, devant un Dieu quelconque auquel on aurait à rendre des comptes. Tel est leur souhait.

Plusieurs autres m'ont tenu ce raisonnement : “ Je ne vois jamais les membres de ma famille (cherchent-ils eux-mêmes à les voir?). Je ne veux pas que tous ces hypocrites viennent ensuite déposer le traditionnel petit bouquet sur ma tombe le jour de la Toussaint, en essuyant au coin de l'oeil une hypothétique larme de crocodile. L'incinération, y'a qu'ça d'vrai. Pas de trace, pas de tombe, plus rien! ”

La société moderne a de multiples raisons d'encourager la crémation (ou incinération) des cadavres. Mon propos n'est pas de les énumérer ici en détails. La principale est certainement la surcharge des cimetières, surtout en grandes agglomérations. Des associations crématistes se creéent un peu partout, pour encourager ceux qui sont (encore) vivants à prévoir l'incinération de leur futur cadavre.

La question et la préoccupation de beaucoup de chrétiens, qui motivent cette étude, c'est :

Un chrétien peut-il décider, ou doit-il refuser, de se faire incinérer après sa mort ?


Qu'en dit la Bible?
On ne relève dans l'Ancien Testament aucune suggestion ni interdiction particulières, pas même une allusion concernant l'éventuelle crémation des cadavres.

Si la loi de Moïse, avec ses 613 commandements, ne laisse rien au hasard et à l'imagination à propos des vivants, leur vie individuelle et sociale, quelle discrétion, une fois qu'ils sont morts !

Si les religions humaines sont intarissables sur le mortuaire et le funéraire, déployant un luxe de détails pour le rituel et le cérémonial qui prend en charge les humains dès que ceux-ci passent de vie à trépas, l'Ecriture est quasi muette sur ce sujet.

La seule recommandation impérative que j'ai relevée, est celle d'enterrer, avant le coucher du soleil, les cadavres des pendus, car celui qui est pendu est un objet de malédiction auprès de Dieu (Deutéronome 21: 23 / Josué 8 : 29 / 10 : 26, 27).

D'une manière générale, les cadavres humains étaient enterrés, ou ensevelis, selon une sépulture (rituel accompagnant l'inhumation), et dans une sépulture (tombe identifiée) permettant de perpétuer le souvenir du défunt auprès des générations futures. En Ecclésiaste 6. 3, on peut lire : Quand un homme aurait cent fils, vivrait un grand nombre d'années, et que les jours de ses années se multiplieraient, si son âme ne s'est pas rassasiée de bonheur, et si de plus il n'a pas de sépulture, je dis qu'un avorton est plus heureux que lui.

La honte suprême pour un défunt, c'était d'avoir son cadavre abandonné et dévoré par les chiens, les hyènes ou les vautours. Tel fut le sort du cadavre de la reine Jézabel (2 Rois 9 : 34).

Les personnages importants et riches bénéficiaient du privilège d'avoir leur cadavre embaumé et conservé dans des étoffes et des aromates. C'était une opération délicate, fort longue et coûteuse, réservée à une élite. Quarante jours furent employés à embaumer le corps du patriarche Jacob (Genèse 50 : 3). Après la mort de Jésus, son corps fut enveloppé de bandes, avec les aromates, comme c'est la coutume d'ensevelir, chez les Juifs (Luc 19 : 40). L'opération d'embaumement définitif ne fut pas même commencée, son corps ayant repris vie et le tombeau trouvé vide le troisième jour après sa mort (Marc 16 : 1 à 6).

Selon le récit que fit Jésus (Luc 16. 19 à 31), le “ mauvais riche ”, qui menait chaque jour joyeuse et brillante vie dans le luxe et l'égoïsme, mourut, et il fut enseveli. Compte tenu de son rang social et de ses richesses, son corps fut probablement embaumé. Un pauvre, nommé Lazare, mendiant et malade, se nourrissait tant bien que mal des déchets qui tombaient de la table du riche. Il mourut, lui aussi. Il n'est pas dit qu'il fut enseveli, encore moins embaumé. Son cadavre fut probablement jeté sur une décharge et peut-être dévoré par les chiens qui, de son vivant, léchaient ses ulcères. Son esprit fut porté par les anges dans le sein d'Abraham. Par contre, celui du riche fut précipité dans le séjour des morts, antichambre de la perdition éternelle.

Donc, la qualité et la nature de la sépulture de notre cadavre n'auront aucune incidence sur notre destinée éternelle. Remarque à tenir présente à notre esprit jusqu'à la fin de cette étude. Il semble que ce fut l'optique d'Eric Tabarly, disparu en mer en Juin 98. Peu après le drame, la radio reproduisait une ancienne interview du navigateur. Le reporter lui demandait s'il avait exprimé ses dernières volontés pour sa dépouille mortelle : “Aimeriez-vous, comme c'est la coutume dans la marine, reposer au fond de cette mer que vous avez tant aimée? ” Tabarly répondit : “ Je me moque de ce que deviendra mon corps après ma mort. Si quelqu'un décide de le jeter sur un tas de fumier, je n'en ai rien à f.... ”.

Dans le Nouveau Testament, on ne trouve aucune indication ni directive, aucun enseignement ni conseil sur la façon, pour les chrétiens, de régler son compte à leur dépouille mortelle. L'attention est beaucoup plus attirée sur ce que sera le croyant après sa résurrection, que sur ce qu'est appelé à devenir sa dépouille, après sa mort physique.

N'est-ce pas surtout cela qui compte... appuyé et confirmé par ce texte, le plus significatif, à mon avis? Jugez vous-même :


Tu es poussière et tu y retourneras
Revenons à la question qui est à l'origine de cette étude : Un chrétien peut-il se faire incinérer et, en outre, avoir ses cendres dispersées?

“ Non, répondent les uns, car, à la résurrection, il n'y aurait plus aucun vestige ni reste de l'ancienne nature, d'où impossibilité pour Dieu de redonner vie à la première dépouille. Nous avons un précédent célèbre dans la personne de Jésus. C'est bien son corps humain initial qui est revenu à la vie. Il n'a pas reçu un corps nouveau et différent, puisque, après sa résurrection, le tombeau était vide de tout cadavre.

— Il faut remarquer, disent certains autres (dont je suis), que Jésus constitue une exception dans le processus de résurrection qui se manifestera à l'encontre de tous les futurs ressuscités. Selon le discours magistral que Pierre l'apôtre fait le jour de la Pentecôte (Actes 2. 22 à 32), Jésus parle déjà par le prophète David et annonce sa résurrection en ces mots : (Eternel!), tu n'abandonneras pas mon âme dans le séjour des morts, et tu ne permettras pas que ton Saint voie la corruption (verset 27). Au moment où Pierre en parle et le rappelle (verset 29), David est mort depuis environ 1000 ans. On peut se faire une idée de l'état de corruption dans lequel se trouvait son cadavre... comme tous les humains qui sont morts avant et depuis, selon les faits constatés, et le verdict de Dieu prononcé à l'intention d'Adam, dès sa chute : “ tu retourneras dans le terre d'où tu as été tiré; car tu es poussière, et tu retourneras dans la poussière (Genèse 3. 19).

Y a-t-il une grosse différence entre un grain de poussière et un grain de cendre? Peut-on compter sur les ossements qui, soigneusement conservés, permettraient à Dieu, lors de la résurrection, d'y faire pousser de la chair, des organes et de la peau? Le patriarche Joseph avait exprimé comme dernière volonté que ses os ne restent pas en Egypte, mais retournent en terre de Palestine (Genèse 50. 25). Etait-ce en vue de s'assurer une meilleure résurrection? J'en doute fort.

Songez à tous les corps calcinés dans les incendies, civils et militaires, déchiquetés par les explosions, désintégrés dans celles des bombes atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki, en 1945, dévorés par les charognards du ciel, de la terre et de la mer, rongés par les vers, les bactéries et les agents chimiques, tous les ossements mélangés et empilés dans les ossuaires, puis broyés et calcinés. Tu es poussière et tu retourneras dans la poussière!


Archives et fichiers célestes
Si une centrale nucléaire, une raffinerie de pétrole ou un paquebot de croisière sont entièrement détruits par un incendie ou une explosion, va-t-on récupérer les anciens matériaux (ce qu'il en reste et dans quel état?), si on a besoin de les reconstruire à l'identique? Non , bien sûr, et ce n'est pas cela qui compte le plus, mais c'est de retrouver tous les plans, descriptifs et formules qui, en général, sont soigneusement conservés dans les bureaux d'études, et permettent de reconstruire, au boulon près, ces énormes bâtiments et édifices détruits.

Et Dieu, peut-on douter de sa capacité à conserver, dans ses archives célestes, des plans et descriptifs précis et détaillés de chacune de nos personnes?... Dieu, aidé de tous ses anges, puissants en force et qui exécutent ses ordres en obéissant à la voix de sa Parole... qui sont ses serviteurs et font sa volonté (Psaume 103 : 20, 21)... tous ces esprits au service de Dieu... ces myriades qui forment le choeur des anges... (Hébreux 1 : 14 / 12. 22), des anges super-informaticiens auprès desquels Bill Gates, le champion mondial de Microsoft, fait figure d'apprenti, ces programmeurs du Royaume de Dieu entrant toutes sortes d'informations sur les disquettes, puces et ordinateurs célestes aux capacités d'enregistrement et de traitement illimitées.

Si on admet que Dieu est le Créateur du cerveau de l'homme, lequel a pu inventer et mettre en oeuvre les super-ordinateurs et Internet, notre imagination, notre humilité et notre foi n'auront pas de peine à concevoir que Dieu (le Créateur) peut aller infiniment au-delà de ce que pourra jamais faire l'homme (la créature) (Ephésiens 3: 20).

Amis croyants, ensemble soyons tranquilles et sereins. Lors de la résurrection des rachetés, la première pour le salut et le règne (1 Thess. 4 : 14 à 17 / Apoc. 20 : 4, 6), aucun de ceux-ci ne sera oublié, quel que soit l'état dans lequel sera devenue sa dépouille mortelle. Nous sommes maintenant enfants de Dieu et ce que nous serons n'a pas encore été manifesté, mais nous savons que, lorsque cela sera manifesté, nous serons semblables à Lui (Jésus-Christ) parce que nous le verrons tel qu'il est (1 Jean 3 : 2).

Pour les incrédules actuels qui peuvent lire ces lignes, et le seront toujours lors de leur mort, aucun espoir d'échapper à la deuxième résurrection, pour le jugement cette fois (Apoc. 20 : 11 à 15), même si pas un seul grain de cendre de leur corps incinéré ne pourra être retrouvé. "Eternel... Où irais-je loin de ton esprit, et où fuirais-je loin de ta face? Si je monte aux cieux, tu y es. Si je me couche au séjour des morts, t'y voilà" (Psaume 139 : 7 et 8). "Aucun d'eux n'échappera (dit le Seignur). S'ils pénètrent dans le séjour des morts, ma main les en arrachera" (Amos 9 : 1 et 2).

A la fin de cette étude, je pose de nouveau et pour la dernière fois la question : Un chrétien peut-il prévoir de faire incinérer son cadavre?

Réponse, plusieurs fois entendue : “ Absolument pas! L'incinération est interdite pour les chrétiens ”.

A votre avis, cette réponse résulte-t-elle d'une prise de position rigide et dogmatique, ou d'un examen attentif des Ecritures, celles-ci exprimant la volonté de Dieu pour ce qui nous concerne?

Là encore, en l'absence de directives bibliques précises et impératives concernant ce sujet, que chacun ait en son esprit une pleine conviction (Romains 14 : 5), et si, dans ce domaine, il manque de sagesse, qu'il la demande à Dieu, qui donne à tous simplement et sans reproche, et elle lui sera donnée. Mais qu'il la demande avec foi, sans douter; car celui qui doute est semblable au flot de la mer, agité par le vent et poussé de côté et d'autre (Jacques 1: 5, 6).

Si je peux me permettre de vous faire connaître ma position personnelle, la voici :

Jusqu'à présent, j'ai quelques raisons de pencher pour l'incinération, mais elles ne sont pas assez impératives pour les exprimer sous forme de dernières volontés.

Comme l'a dit E. Tabarly, je me soucie fort peu de l'avenir de ma dépouille mortelle,  ayant plutôt les yeux fixés sur la rémunération, comme Moïse, déjà, en son temps (Hébreux 11. 26), et, l'un comme l'autre, regardant aux choses invisibles, plutôt qu'aux visibles; car les choses visibles sont passagères, et les invisibles sont éternelles. Nous savons, en effet, que, si cette tente où nous habitons sur la terre est détruite, nous avons, dans le ciel, un édifice qui est l'ouvrage de Dieu, une demeure éternelle qui n'a pas été faite de main d'homme (2 Corinth. 4 : 18 à 5 : 1).

Si un chrétien affirme catégoriquement : “ Je tiens absolument à ce que mon cadavre soit incinéré ”, et qu'un autre rétorque : “ Pour moi, il n'en est pas question ”, je respecterai la décision de chacun d'eux, mais je me permettrai de leur demander tranquillement, à l'un comme à l'autre, de m'expliquer, aussi calmement, les raisons qui ont motivé leur choix. Je n'ai pas la prétention de tout connaître et ils peuvent m'apporter, sur le sujet, certains éclairages utiles que je n'avais pas perçus jusqu'alors, ce qui peut se révéler vrai, également pour eux, dans la mesure où ils sont disposés à dialoguer sur la question, ce qui, hélas, n'est pas toujours le cas, lorsqu'il y a prise de position dogmatique.

Je conclurai par cette réflexion et l'expression d'une pensée personnelle :

Si la législation de mon pays, motivée par des raisons de bien public, décide un jour de rendre obligatoire l'incinération des cadavres, je ne ferai rien pour m'y opposer, ne disposant d'aucun argument moral, biblique ou spirituel valable pour contrecarrer cette décision des autorités civiles auxquelles Dieu, par sa Parole, m'ordonne de me soumettre, dans la mesure où celles-ci ne vont pas à contre-courant de la volonté et de la pensée de Dieu exprimées dans la Bible, Sa Parole (Romains 13 : 1 à 7 / 1 Pierre 2 : 13 à 17).

S'il apparaissait que les motivations poussant ces autorités civiles à prendre cette décision, soient d'origine religieuse, ou inspirées par une pensée superstitieuse émanant d'une personne ou d'un groupe de pressions ayant réussi, par des méthodes quelconques et douteuses, à peser sur les décisions du gouvernement, je me permettrais, sous le regard de Dieu, et selon les moyens qu'il me suggérerait et m'autoriserait à employer, de manifester ma réprobation.



Notes

[1] - Avec permission. Tiré du livre Biblique ou dogmatique ? (Editions "Le Lampiste"). Pour commander un livre de M. Renneteau.