Paul Gosselin 2016
Voici la quatrième réponse de mon interlocuteur, suivie de la mienne. (mais pour commencer au début...)
Bonsoir,
1. Theorie de l'evolution: cliches et difficultés de comprehension.
Un article fort intéressant sur les difficultes de comprehension
de la theorie de l'evolution à travers 8 questions auxquelles répond
JS. Steyer, paléontologue au CNRS.
Sa réponse à la première question est particulierement
claire à l'égard de vos theses: (compatibilite science / foi)
=>
" L’esprit humain a du mal à accepter le rôle important
du hasard et l’absence de hiérarchie dans l’évolution."
=>
" Même si certains religieux ont participé à la
description de la nature, les religions sont des prismes nous empêchant
de la comprendre."
=>
" Des spiritualistes (parfois déguisés en scientifiques
pour mieux brouiller les pistes) prêchent alors un déterminisme
dans l’évolution : « OK, l’évolution
existe, mais elle est dirigée par Dieu. »
Ce mélange entre science et religion – certains parlent même
de « réconciliation » – n’a pas
lieu d’être puisque ces deux magistères (pour reprendre
les termes de Stephen Jay Gould) répondent à des questions
fondamentalement différentes."
Lien:
http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2014/03/19/8-questions-pour-en-finir-avec-les-cliches-sur-la-theorie-de-levolution/
2. Newton, les Lumières, le matérialisme méthodologique
comme "fondement des sciences modernes".
" Il est certain que presque tous les scientifiques des 17e et 18e
siècles, dont Isaac Newton, auraient rejetés du revers de
la main une telle affirmation "
On peut l'imaginer en effet. Tout comme l'astrologie (entre autre pseudo
science ) à mis plusieurs siècles avant de perdre son statut
de "science" telle qu'on pouvait la concevoir avant l'avènement
de la méthode scientifique. Simplement l'autonomie des sciences n'a
pas ete acquise en un jour dans un contexte historique ou cette derniere
à toujours été subordonnée à l'Eglise
!
La question des origines représente certes le Graal de la connaissance
mais rien ne la distingue objectivement de celles que nos ancêtres
pouvaient se poser à propos des éclipses ou du tonnerre...
3. Génome, information et complexite.
Il est vrai que la notion de complexite fait debat. L'exemple du génome
de l'épi de blé montre précisément que quantité
ne signifie pas qualité. Les notions d'information et de fonction
ne sont pas davantage discriminantes elles seules pour statuer sur ce qui
fait de nous des humains. Par exemple de nombreuses especes aussi bien animales
que vegetales possedent un nombre de fonctions impressionnantes absentes
chez l'homme.(le sens de l'orientation chez les abeilles, la détection
des champs magnétiques chez le requin etc...) Ce qui fait notre specificite
tient essentiellement a notre phénotype, c'est à dire l'expression
de nos genes. Une analogie tirée du monde automobile permet de bien
évaluer le probleme. Par exemple, une cadillac des années
60 et une formule 1 dernière génération ont toutes
deux un châssis, un moteur, un volant, des freins etc... Mais les
performances sur route n'ont rien à voir.
C'est ça aussi l'evolution, cette capacité de s'adapter a
x situations avec des briques de base pratiquement identiques.
Application à l'informatique
" Pour « apprendre de ses erreurs » par exemple, il faut
que quelqu’un ait dit au programme ce qu’est une « erreur
"
Pas nécessairement. Une erreur est juste une réponse inadéquate
dans une situation particulière. Un objectif non realise sera considéré
comme une "erreur" par le système. Par exemple, les robots
qui apprennent à marcher le font en toute autonomie. Leur objectif
se résume à ne pas tomber.(c'est une question de survie dans
la nature)
4. Principe de parcimonie
" Ouais, justement, « limiter les hypothèses à
ce qui est nécessaire » ça me semble une bonne idée.
Et si on regarde le monde biologique regorgeant de mécanismes (qui
sont la manifestation physique d’une intentionnalité) ... "
On est donc d'accord sur le principe.
Reste a delimiter ce qui releve du strictement "necessaire et suffisant".
Probleme: Dieu ne peut être une cause nécessaire et suffisante
puisqu'avant tout il est un concept indecidable...
C'est un problème de taille, non ?
Oui, c'est ça aussi l'evolution. Des finalites qu'il convient de
ne pas confondre avec un "finalisme à l'oeuvre". En d'autres
termes, teleonomie n'est pas teleologie.
(Hasard et necessite - Jacques Monod)
Au plaisir.
Albert,
Ouais, comme c'est ma mauvaise habitude, voici encore ma réplique
faite à la vitesse de l'escargot... Bon, enfin, finalement, j'y arrive,
etc....
À ce stade, il me semble que l'échange commence à tourner un peu en rond. Enfin, si je m'engage à lire une réplique de votre part (s'il y a) je ne m'engage pas d'y répondre. Et si vous ne posez que des questions ennuyeuses, cela pourrait me grandement me faciliter les choses... Je compte donc sur votre bonne volonté...
Bonsoir,
1. Theorie de l'evolution: cliches et difficultés de comprehension.
Un article fort intéressant [intitulé:
8
questions pour en finir avec les clichés sur la théorie
de l’évolution] sur les difficultes de comprehension
de la theorie de l'evolution à travers 8 questions auxquelles répond
JS. Steyer, paléontologue au CNRS.
Sa réponse à la première question est particulierement
claire à l'égard de vos theses: (compatibilite science /
foi)
=> " L'esprit humain a du mal
à accepter le rôle important du hasard et l'absence de hiérarchie
dans l'évolution."
Bof, sur cette dernière phrase, je trouve inacceptable que les évolutionnistes jouent ce petit jeu hypocrite en prétendant que leur mythe d'origines est “ scientifique ”, mais refusant ensuite de montrer patte blanche et donner des preuves empiriques et expérimentales (car c'est ce que font les scientifiques véritables...) de leur thèse centrale, c'est-à-dire que tous les êtres vivants (ceux que nous observons directement, ou encore dont il reste des traces dans les fossiles) ont leur source dans un ancêtre unicellulaire commun et que celui-ci tire son origine de l'inorganique, sans l'intervention d'AUCUN agent intelligent à aucune étape du processus. Sur le plan logique, les prétentions extraordinaires de cette théorie exigent aussi des preuves extraordinaires. Toute théorie scientifique véritable DOIT rencontrer cette exigence. Mais bon, ça fait plus de 150 ans qu'on attend... Les évolutionnistes font d'ailleurs la démonstration de l'insuffisance scientifique de leur mythe d'origines en proposant des arguments aussi faibles que les variations de la taille et la forme du bec chez les pinsons des Galapagos, quelques variations sans conséquences de coloration chez la phalène du bouleau ou des réactions variables aux antibiotiques chez les bactéries. Dans les faits, les preuves empiriques que peuvent proposer les évolutionnistes sont dérisoires et insignifiantes si on les oppose aux prétentions grandioses de la “ théorie ”. Par ailleurs, le ton très condescendant employé par Steyer ci-dessus est complètement déplacé, mais très efficace sur le plan de la manipulation. Le message (pas très subliminal) est que si on n'accepte pas le mythe d'origines matérialiste c'est qu'inévitablement on est atteint d'un cas avancé “ d'insuffisance intellectuel ” et que notre cerveau détraque quelque peu... Merci m. Steyer de nous illuminer de tant de “ sagesse ”... Il faut avouer que le titre de l'interview avec Steyer est révélateur, car il dénote de l'irritation, de l'impatience, mais j'ai de mauvaises nouvelles pour lui, non les critiques de l'évolution ne sont pas finis. Ça ne fait que commencer... Désolé, mais l' Empereur est nu (mais évidement ces courtisans sentent bien leur devoir de s'extasier devant la beauté de ses vêtements).
=> " Même si certains religieux ont participé à la description de la nature, les religions sont des prismes nous empêchant de la comprendre."
Affirmation gratuite... Si j'ai bien compris, Steyer rejette toutes les contributions à la science faites par Newton, Galilée, John Ray, Karl von Linnée et tant d'autres ? Toutes ces recherches sont insignifiantes et bonnes pour la poubelle ? À mon avis, Steyer nous fait là une démonstration assez éclatante (mais pas très original) d'un esprit borné. Mais si un jour Steyer devait prendre la peine de lire avec attention les recherches de Jaki et Hooykaas sur l'histoire de la science (voir au bas) il verrait que non seulement que le système de croyances judéo-chrétien n'a pas nui au progrès de la science, mais que sur le plan des présupposés, il a fourni des conceptions tout à fait critiques et essentielles qui ont permis à l'Occident de dépasser les balbutiements des Anciens, car la science véritablement expérimentale est un acquis de l'Occident chrétien.
Mais bon, si dans l'affirmation de Steyer ci-dessus on remplace le mot “ comprendre ” par “ conversion au système de croyances des Lumières ”, alors tout s'éclaire... Évidemment pour Steyer, il ne s'agit pas de comprendre une équation mathématique, les propriétés des gaz rares ou encore la loi de la gravité. Rien à voir. Il s'agit donc d'adopter la vision de monde “ correcte ” et approuvée et avoir foi qu'une explication matérialiste des origines puisse rendre compte du vivant, peu importe les contradictions empiriques. Ça me semble donc hypocrite de la part de Steyer (mais c'est typique des disciples des Lumières) de vendre un système idéologico-religieux, en la faisant passer pour de la “ science objective ” (on se met donc à l'abri des critiques). Mais Steyer n'a rien inventé à ce sujet, il ne fait que régurgiter la salade des Lumières massivement diffusée dans le système universitaire et dans les médias...
=> " Des spiritualistes (parfois déguisés en scientifiques pour mieux brouiller les pistes) prêchent alors un déterminisme dans l'évolution : “ OK, l'évolution existe, mais elle est dirigée par Dieu. ”
Ce mélange entre science et religion – certains parlent même de “ réconciliation ” – n'a pas lieu d'être puisque ces deux magistères (pour reprendre les termes de Stephen Jay Gould) répondent à des questions fondamentalement différentes."
Ouais, je crois qu'on est du même avis pour l'intérêt de ces genres de mélanges (NOMA), d'un évolutionnisme théiste, donc d'une évolution, mais dirigée par Dieu. On nage dans l'incohérence. C'est le genre de truc promu ces jours-ci entre autres par le Vatican ainsi que la fondation BioLogos qui fait un marketing massif auprès du clergé. Je pense que l'expression attribuée à Lénine, des “ idiots utiles ”, est tout à fait légitime dans ce contexte. Dans l'église Catholique, on souffre encore du choc post-Galilée devant l'inquisition. Cet épisode a beaucoup marqué l'église Catholique au point où, de crainte de paraître “ anti-scientifique ”, ils sont prêts à toutes les courbettes et bassesses devant les bonzes de la science. Le marketing, le marketing... Mais bon, il va sans dire qu'on trouve aussi des théologiens d'une servilité comparable chez les Protestants. Pour ce qui est de Francis Collins, par exemple, même si je rejette ses thèses sur l'origine de la vie, je ne laisserais jamais sous-entendre, comme le fait Steyer, que Collins serait un “ spiritualiste déguisé en scientifique ”. Les nombreuses contributions de Collins en génétique me semblent indisputables. Je pense qu'il faut faire la part des choses entre les croyances d'un individu sur l'origine de la vie et ses accomplissements scientifiques. Mais bon, lorsqu'on a un argumentaire si faible, je suppose qu'on ne doit pas dédaigner les attaques ad hominien.
Ceci dit, j'ai lu l'article de Steyer et il a l'arrogance typique du scientifique médiatique francophone. Il parle avec autorité sur le créationnisme et le DI, mais on chercherait en vain dans cet interview la plus petite indice que Steyer ait lu UN seul texte créationniste ou du Dessein Intelligent (mais il faut le comprendre, car après tout, pour maintenir son “ standing ” il doit éviter la moindre contamination par l'hérésie). Évidemment il sait de quoi il parle... Eh oui, malheureusement c'est trop typique de l'intello français discourant de manière si savante sur le sujet des origines et sur la “ menace créationniste ”... Leur discours en général n'expose pas leur savoir, mais que leurs préjugés et les idées reçues qu'on leur a inculquées. Mais évidemment Steyer “ sait ”... et il a toutes les répliques approuvées et sait aussi s'en tenir au scripte des “ idées reçues ” sur les origines. Ceci dit, sans doute Steyer est un gars qui a du potentiel et de l'avenir, car manifestement il sait réciter ce que les élites modernes ou postmodernes veulent bien entendre et il est tout à fait dans la ligne orthodoxe des sciences sociales du monde francophone.
2. Newton, les Lumières, le matérialisme méthodologique comme "fondement des sciences modernes".
" Il est certain que presque tous les scientifiques
des 17e et 18e siècles, dont Isaac Newton, auraient rejetés
du revers de la main une telle affirmation "
On peut l'imaginer en effet. Tout comme l'astrologie
(entre autre pseudo science) à mis plusieurs siècles avant
de perdre son statut de "science" telle qu'on pouvait la concevoir
avant l'avènement de la méthode scientifique. Simplement
l'autonomie des sciences n'a pas ete acquise en un jour dans un contexte
historique ou cette derniere à toujours été subordonnée
à l'Eglise !
La question des origines représente certes le Graal de la connaissance,
mais rien ne la distingue objectivement de celles que nos ancêtres
pouvaient se poser à propos des éclipses ou du tonnerre...
Bof, la science reste inévitablement asservie à un système idéologico-religieux. Aujourd'hui, pour la majorité des scientifiques, ce n'est plus évidemment le Christianisme, mais plutôt divers systèmes idéologico-religieux issus des Lumières. En sciences sociales et dans le monde culturel, ce sont plutôt des concepts postmodernes qui dominent. Pour fouiller plus sérieusement la question, il faut lire ma série Fuite de l'Absolu.
3. Génome, information et complexite.
Il est vrai que la notion de complexite fait debat.
L'exemple du génome de l'épi de blé montre précisément
que quantité ne signifie pas qualité. Les notions d'information
et de fonction ne sont pas davantage discriminantes elles seules pour
statuer sur ce qui fait de nous des humains. Par exemple de nombreuses
especes aussi bien animales que vegetales possedent un nombre de fonctions
impressionnantes absentes chez l'homme (le sens de l'orientation chez
les abeilles, la détection des champs magnétiques chez le
requin etc...) Ce qui fait notre specificite tient essentiellement a notre
phénotype, c'est à dire l'expression de nos genes. Une analogie
tirée du monde automobile permet de bien évaluer le probleme.
Par exemple, une cadillac des années 60 et une formule 1 dernière
génération ont toutes deux un châssis, un moteur,
un volant, des freins etc... Mais les performances sur route n'ont rien
à voir.
C'est ça aussi l'evolution, cette capacité de s'adapter
a x situations avec des briques de base pratiquement identiques.
Intéressant, car en suivant votre logique, les ingénieurs et mécaniciens des écuries de Formule 1 (travaillant avec des objectifs précis) ne doivent pas être considérés des agents intelligents et n'ont contribué d'aucune manière aux avancées que représente le bolide de Formule 1 actuel ? On peut donc les sortir de l'équation. Enfin...
Application à l'informatique
" Pour “ apprendre de ses erreurs ”
par exemple, il faut que quelqu'un ait dit au programme ce qu'est une
“ erreur "
Pas nécessairement. Une erreur est juste une réponse inadéquate
dans une situation particulière. Un objectif non réalisé
sera considéré comme une "erreur" par le système.
Par exemple, les robots qui apprennent à marcher le font en toute
autonomie. Leur objectif se résume à ne pas tomber.(c'est
une question de survie dans la nature)
Ha ! “ Un objectif non réalisé ” vous dites ? Mais QUI a fixé un “ objectif ” à ce programme ? Non, non, non, ça ne va pas. Et si vous continuez, je vais croire également que les logiciels qu'on vous attribue ont, dans les faits, été mis au point par des souris pianotant sur votre clavier tandis que vous aviez quitté votre bureau pour aller au bistro du coin pour boire un verre avec des copains et regarder des parties de foot. Inévitablement, aucun agent intelligent n'est intervenu lors de leur développement. Bon, enfin...
Chez les anglophones, on trouve certains évolutionnistes reconnaissant que le néo-darwinisme mérite d'être euthanasié. L'américain, ingénieur en électronique et consultat web renommé, Perry Marshall, par exemple a lancé ce défi à la communauté évolutionniste :
“Show an example of Information that doesn't come from a
mind. All you need is one.”
“Montrez-moi un exemple d'information qui n'a pas sa source dans un esprit [ou agent intelligent]. Un seul exemple suffira. ” (traduction libre)
Et Marshall a même offert un prix de 3 millions de dollars pour résoudre ce problème... Voici une condition qu'il pose
Humans can design the experiment, with all manner of state-of-the-art
laboratory equipment, ideal conditions etc. They just can't cheat: the
submitted system cannot be pre-programmed with any form of code whatsoever.
“ [J'accepte que] les humains puissent concevoir l'expérience,
au moyen d'équipements de laboratoire à la fine pointe,
des conditions idéales, etc. [Par contre], ils ne peuvent pas tricher:
le système soumis ne doit pas être pré-programmé
avec la moindre forme de code quelconque. ” (traduction libre)
Si donc vous êtes un évolutionniste convaincu et informaticien aguerri, alors lancez-vous dans ce projet. Ce sera de l'argent facile, ne pensez-vous pas ? Par ailleurs Marshall explique pourquoi à son avis, il y a en effet isomorphisme (c'est-à-dire des parallèles logiques significatifs) entre la communication de messages par des humains (définie par Shannon) et la communication d'informations génétiques lors de la reproduction d'un organisme vivant. Dans l'article ci-dessus, pour appuyer son argument, il énumère 10 parallèles entre l'informatique et la biologie/génétique.
4. Principe de parcimonie
" Ouais, justement, “ limiter les hypothèses
à ce qui est nécessaire ”
ça me semble une bonne idée. Et si on regarde le monde biologique
regorgeant de mécanismes (qui sont la manifestation physique d'une
intentionnalité) ... "
On est donc d'accord sur le principe.
Reste a delimiter ce qui releve du strictement
"necessaire et suffisant".
Probleme: Dieu ne peut être une cause nécessaire et suffisante
puisqu'avant tout il est un concept indécidable...
Ouais, sauf petit détail... “ Dieu, un concept indécidable ”, je pense que c'est une manière un peu hypocrite d'exprimer la chose, car cela laisse entendre que si on pose la science comme savoir suprême, ultime (et devant lequel toutes les autres affirmations doivent être jugées), alors puisque Dieu ne peut être filmé par une caméra digitale, soumis à des tests d'alcalinité ou mesurer s'il produit du courant électrique, il faut conclure qu'il n'existe pas. C'est un peu con, car si on regarde de l'autre coté de cette équation logique, alors on constate cet état des choses est dû au fait que la science est LIMITÉE (aux choses observables) et ne dispose d'aucun outil pour trancher la question de l'existence de Dieu. Par ailleurs, si donc un être omniscient et omnipotent n'a pas trop envie de se soumettre à nos expériences scientifiques à la con, alors pouvons-nous le forcer ? C'est une question qui se pose... Alors si la science n'a pas d'emprise sur Dieu, ceci est dû aux limites de la science. Répète après moi, la science est un savoir limité. Ça va mieux ? Mais ça, évidemment, les dévots des Lumières n'en parlent jamais... En passant, l'affirmation: "Tout ce qui existe dans le monde matériel est le résultat d'un processus naturel", à votre avis, est-ce un concept décidable selon toi ?
Mais pour revenir à la question initiale, si en effet la science est limitée à l'observable il en résulte que la science ne peut RIEN affirmer sur le sujet de l'existence de Dieu et que pour se former une opinion juste et éclairée sur le sujet, il faut mettre de côté la science et élargir la gamme des données que l'on est prêt à considérer. Les lacunes de la science ne tranchent en aucun cas toute cette question. Anthony Flew, le philosophe britannique a longtemps été un partisan zélé de l'athéisme et a rédigé plusieurs ouvrages érudits attaquant le théisme et a participé à plusieurs débats contre des théistes. Mais au cours des années il a évolué dans sa pensée et a fini par rejeter le matérialisme et accepter l'idée d'un Créateur. Questionné sur ce changement de convictions, voici son raisonnement :
There were two factors in particular that were decisive. One was my growing empathy with the insight of Einstein and other noted scientists that there had to be an Intelligence behind the integrated complexity of the physical Universe. The second was my own insight that the integrated complexity of life itself – which is far more complex than the physical Universe – can only be explained in terms of an Intelligent Source. I believe that the origin of life and reproduction simply cannot be explained from a biological standpoint despite numerous efforts to do so. With every passing year, the more that was discovered about the richness and inherent intelligence of life, the less it seemed likely that a chemical soup could magically generate the genetic code. The difference between life and non-life, it became apparent to me, was ontological and not chemical. The best confirmation of this radical gulf is Richard Dawkins' comical effort to argue in The God Delusion that the origin of life can be attributed to a "lucky chance." If that's the best argument you have, then the game is over. No, I did not hear a Voice. It was the evidence itself that led me to this conclusion.
Mais évidemment, cela ne fait pas de Flew un chrétien, uniquement un déiste, un peu comme Voltaire. C'est un petit pas de franchi, mais il reste encore à régler une question bien plus importante encore, QUI est ce Créateur ? Mais évidemment plusieurs s'arrêtent là, car cette seconde question est bien plus dérangeante encore que la première... Mais pour aller plus loin, je suggère fortement la lecture de l'essai de C.S. Lewis, Mere Christianity (1952). Il a été traduit en français à quelques reprises, portant soit le titre “ Être ou ne pas être : le christianisme est-il facile ou difficile? ” ou encore “ Fondements du christianisme ”. Lewis, qui autrefois a été athée comme toi, y propose une discussion très logique et assez originale partant de phénomènes observables qui sont des indices de l'existence de Dieu. Une fois ce point admis, il discute ensuite de l'intérêt du christianisme par rapport aux autres systèmes idéologico-religieux. Très bien fait, enfin, pas ennuyeux. Et contrairement aux dévots des Lumières, qui trop souvent cherchent à impressionner avec un discours verbeux et obscur, Lewis est lucide dans son exposé, et tout à fait accessible. Et pour ce qui est de Jésus de Nazareth, ce ne serait pas un exercice inutile de mettre de côté tout ce que les gens religieux ont pu te dire dans le passée et aller à la source, c'est-à-dire lire les Évangiles pour vous-mêmes et faire votre propre idée si la personne de Jésus-Christ mérite d'être suivie ou pas.
C'est un problème de taille, non ?
Oui, c'est ça aussi l'evolution. Des finalites
qu'il convient de ne pas confondre avec un "finalisme à l'oeuvre".
En d'autres termes, teleonomie n'est pas teleologie.
(Hasard et necessite - Jacques Monod)
On règle un problème à la fois logique et empirique (l'origine des innombrables mécanismes et codes, ainsi que les instructions que stockent l'ADN, dans le monde vivant) avec un simple jeu de mots. Impressionnant... Mais si le matérialisme est un dogme, c'est la seule solution...
Ayant côtoyé beaucoup d'athées, je connais bien la chanson : puisque le mal existe, il ne peut donc y avoir de “ bon Dieu ”. Si l'athéisme semble “ régler ” la question de l'origine de l'aliénation humaine, mais une fois arrivée à cette solution le matérialisme offre peu de choses, dans la vie de tous les jours, en ce qui concerne donner des raisons pour vivre, surtout lorsqu'il faut confronter une époque de noirceur. Dans le contexte post-darwinien, où un sens de la vie cohérent peut difficilement être établi, est-ce un hasard que Camus pose une question aussi impitoyable (1942: 99)?
Il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux: c'est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie. Le reste, si le monde a trois dimensions, si l'esprit a neuf ou douze catégories, vient ensuite. Ce sont des jeux; il faut d'abord répondre.
Cela semble également le point de vue du mathématicien et athée britannique Bertrand Russell qui notait dans son autobiographie (2000 : 38) :
"There was a footpath leading across the fields to New Southgate, and I used to go there alone to watch the sunset and contemplate suicide. I did not, however, commit suicide, because I wished to know more of mathematics."
Mais quelle chance, Russell avait des capacités en mathématiques (et l'opportunité d'en faire quelque chose) pour donner sens à son existence... Mais si cette porte de sortie c'était fermée ?? Alors ? Inévitablement tout ça se sont des questions TRES sérieuses. Pour le chrétien la question du mal se pose également. Pour les chrétiens ayant bouffé le NOMA, cette question est insoluble. Le mieux qu'ils puissent offrir se sont des conneries du genre : “ Ah, les voies de Dieu sont mystérieuses... ” Le chrétien qui tente de concilier ses croyances avec la propagande évolutionniste se retrouve dans un cul-de-sac car alors même s'il postule un Adam et Eve historique, inévitablement il les fait précéder de millions d'années de mort et de destruction impitoyable car c'est bien ça la sélection naturelle. Dans cette optique, alors la mort et de destruction seraient voulus par Dieu. Mais bon, très peu de ces chréiens y réfléchiront serieusement... Par contre, si on ose prendre le récit de la Genèse au sérieux, on constate que le concept de la Chute est une réalité TRES empirique. Si vous avez déjà vu un jour un proche étendu comme un quartier de viande (bien mis) dans un cercueil, vous avez été confronté à la réalité brutale d'un monde déchu... Même le matérialiste le plus endurci a une réaction de révolte devant cette réalité. Il y a quelque chose en nous qui crie: “ Ce n'est pas normal! ”. Mais si de tous les temps la mort n'était qu'un aspect inhérent et inévitable de la vie, alors pourquoi cette réaction? Si le mythe d'origines évolutionniste était vrai alors la mort devrait nous laisser dans l'indifférence le plus total... Ouais, parfois nos émotions comprennent mieux que notre raison la réalité de la Chute. Dans la vision biblique, la souffrance humaine est donc quelque chose de profondément anormal. L'état présent des choses n'était pas le plan de Dieu. On voit traduite cette réalité dans le Nouveau Testament :
"Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise à la vanité, - non de son gré, mais à cause de celui qui l'y a soumise, avec l'espérance qu'elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or, nous savons que, jusqu'à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l'enfantement. Et ce n'est pas elle seulement; mais nous aussi, qui avons les prémices de l'Esprit, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l'adoption, la rédemption de notre corps." (Rom. 8: 19-23)
Voici quelques autres indices fournis par le Nouveau Testament et qui contradisent l'allfirmation/insinuation que «la mort est en quelque sorte voulu par Dieu»:
et qui a été manifestée maintenant par l’apparition de notre Sauveur Jésus-Christ, qui a détruit la mort et a mis en évidence la vie et l’immortalité par l’Evangile. (2Tite 1:10)
Le dernier ennemi qui sera détruit, c’est la mort. (1Cor 15:26)
Si le chrétien aussi subit les effets de ce monde déchu (parlez-en aux chrétiens de la Syrie, enfin, ceux qui restent...), son espoir véritable n'est pas dans cette vie. L'apôtre Paul, qui avait amplement goûté aux diverses épreuves de la vie, disait ceci :
Or, si l'on prêche que Christ est ressuscité des morts, comment quelques-uns parmi vous disent-ils qu'il n'y a point de résurrection des morts? S'il n'y a point de résurrection des morts, Christ non plus n'est pas ressuscité. Et si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est donc vaine, et votre foi aussi est vaine. Il se trouve même que nous sommes de faux témoins à l'égard de Dieu, puisque nous avons témoigné contre Dieu qu'il a ressuscité Christ, tandis qu'il ne l'aurait pas ressuscité, si les morts ne ressuscitent point. Car si les morts ne ressuscitent point, Christ non plus n'est pas ressuscité. Et si Christ n'est pas ressuscité, votre foi est vaine, vous êtes encore dans vos péchés, et par conséquent aussi ceux qui sont morts en Christ sont perdus. Si c'est dans cette vie seulement que nous espérons en Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes. Mais maintenant, Christ est ressuscité des morts, il est les prémices de ceux qui sont morts. Car, puisque la mort est venue par un homme, c'est aussi par un homme qu'est venue la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, de même aussi tous revivront en Christ, mais chacun en son rang. Christ comme prémices, puis ceux qui appartiennent à Christ, lors de son avènement. Ensuite viendra la fin, quand il remettra le royaume à celui qui est Dieu et Père, après avoir détruit toute domination, toute autorité et toute puissance. Car il faut qu'il règne jusqu'à ce qu'il ait mis tous les ennemis sous ses pieds. Le dernier ennemi qui sera détruit, c'est la mort. (1Cor. 15: 12-26)
Ou, si on exprime la chose d'une manière plus crue, si l'espoir du chrétien se limite à ce monde, alors le christianisme est la chose la plus imbécile qu'on ait inventée... Mais si la doctrine de la Chute nous confronte avec le fait que nous ne sommes plus dans le Jardin d'Éden, il ajoute par ailleurs ce concept que tous détestent, c'est-à-dire que nous avons des comptes à rendre devant Dieu le Créateur et que nous avons péché contre sa Loi et dans les faits nous sommes dignes de jugement. Mais chose curieuse, cette doctrine détestable éclaire un point important du Nouveau Testament. Lorsque les chrétiens disent que Dieu a prouvé son amour en faisant mourir Jésus de Nazareth sur une croix, plusieurs peuvent avoir le réflexe : manière bien étrange de prouver son amour, en faisant mourir un homme ? Qu'est-ce que cette fantaisie ? Pourquoi ne pas nous tous envoyer un gâteau de fête plutôt ?
Mais pour comprendre la mort de Christ, il est essentiel de faire le lien avec la Chute et notre état devant Dieu. C'est là le problème central de la condition humaine. Dans notre état actuel, on mérite le jugement et l'Enfer. Ouais, je sais, tous souhaitent que Hitler, Staline ou Pol-Pot subissent l'Enfer et paient pour leurs crimes, mais Dieu n'est pas un juge partial. TOUS doivent y passer, hommes et femmes. Pas question d'apporter la moindre semence de l'enfer dans nos cœurs (le mensonge, l'orgueil, etc.) au Paradis... Mais Dieu nous propose une porte de sortie à notre dilemme, car il a fait porter la punition que méritaient nos fautes sur son Fils. Et par ce moyen, on peut à nouveau accéder à la relation perdue avec notre Créateur et accéder à nouveau au Jardin. Mais auparavant, comme le fils prodigue de la parabole (Luc 15: 11-32), nous devons tous, hommes et femmes, accepter de nous humilier et reconnaître la justice de Dieu ainsi que notre péché personnel. C'est également ce qu'a fait le bon larron sur la croix à côté de Jésus (Luc 23 : 39-43). C'est à partir de ce point que Dieu nous propose une nouvelle vie, en réconciliation avec les hommes et Dieu, une conscience tranquille et après la mort, avec l'espoir (non factice) d'un monde meilleur.
C'est ce que je vous souhaite un jour.
Portez vous bien
Paul Gosselin
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D'où vient que cet homme qui a perdu depuis peu de mois son fils
unique, et qui, accablé de procès et de querelles était
ce matin si troublé, n'y pense plus maintenant ? Ne vous en étonnez
point: il est tout occupé à voir par où passera ce
sanglier que les chiens poursuivent avec tant d'ardeur depuis six heures.
Il n'en faut pas davantage. L'homme, quelque plein de tristesse qu'il soit,
si on peut gagner sur lui de le faire entrer en quelque divertissement,
le voilà heureux pendant ce temps-là; et l'homme, quelque
heureux qu'il soit, s'il n'est diverti et occupé par quelque passion
ou quelque amusement qui empêche l'ennui de se répandre, sera
bientôt chagrin et malheureux. Sans divertissement, il n'y a point
de joie; avec le divertissement, n'y a point de tristesse. Et c'est aussi
ce qui forme le bonheur des personnes de grande condition, qu'ils ont un
nombre de personnes qui les divertissent, et qu'ils ont le pouvoir de se
maintenir en cet état.
(Pascal: Pensées art. 2, frag. 139 [1960: 113])
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Références
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CAMUS, Albert (1942) Le Mythe de Sisyphe: essai sur l'absurde. Éditions Gallimard [Paris] [Essais 11, Bibliothèque de la Pléiade] 187 p.
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WIKER, Benjamin; FLEW, Anthony (2007) Exclusive Flew Interview (30/10/2007)